Le bilinguisme des enfants fait rêver les parents. Si les classes bilingues sont de plus en plus courtisées, rares sont ceux qui comprennent que l’apprentissage d’une nouvelle langue est un processus long qui ne se fait pas à tout âge. Vivolta vous explique le fonctionnement du bilinguisme.

é Barbara Abdelilah-Bauer, linguiste diplômée en psychologie sociale, spécialiste du développement du langage et de l’identité de l’enfant bilingue, répond à quelques question sur le rôle des classes bilingues dans l’acquisition du bilinguisme.

- A partir de quel âge l’enfant peut-il entrer dans une classe bilingue ?

Très tôt, c'est-à-dire vers 2-3 ans. Une éducation bilingue complète commence dès la maternelle, lorsque l’enfant est en pleine acquisition de son propre langage. Il a alors la flexibilité cérébrale nécessaire pour maîtriser tous les apprentissages. Avant 11 ans, il est capable de prononcer les nouveaux sons, naturellement et sans honte. Le jeune peut ainsi appréhender une nouvelle langue, en assimiler le vocabulaire, en comprendre les règles et en restituer les sons. A l’adolescence, les choses deviennent moins simples. Passé 11 ans, il devient plus difficile d’entrer directement dans une classe bilingue. Il faudra plutôt opter pour un établissement ayant une section internationale. Mais, même dans ce cas, une remise à niveau voire un apprentissage en douceur pourrait être indispensable.

- Dans une classe bilingue , combien de temps faut-il à un enfant pour qu’il maîtrise parfaitement sa seconde langue ?

La maîtrise parfaite d’une langue, maternelle ou non est impossible. Une langue ne stagne pas. Elle évolue. Elle requiert donc un apprentissage constant. Un enfant scolarisé dans une classe bilingue , peut, après plusieurs années de travail, maîtriser sa deuxième langue à la manière d’un natif. C'est-à-dire sans accent, avec une connaissance suffisante du vocabulaire pour s’exprimer de manière claire, naturelle et spontanée. Même dans une classe bilingue , cette compétence s’acquiert lentement et dépend de chaque individu. Le rôle du parent est d’initier son enfant le plus tôt possible afin de lui faciliter un tel apprentissage. Normalement, une scolarité bilingue complète (de la maternelle au baccalauréat) suffit à acquérir l’aisance d’un natif… une pratique régulière permettra ensuite de conserver cette aptitude.

- Comment se passe l’apprentissage de la seconde langue dans une classe bilingue ?

Aujourd'hui on parle de classe bilingue lorsque l’enfant est immergé dans une seconde langue. L’intérêt de ce genre d’éducation est que l’apprentissage ne se fait pas au sens magistral du terme. Au delà des cours de langue, l’enfant fait des choses dans cette langue. Au collège et lycée, des enseignants spécialisés dispensent des cours de maths, d’histoire-géographie, de littérature tout en anglais... A la maternelle ou en primaire, l’enfant apprend des chansons, des rimes, des jeux… en anglais par exemple. La méthode d’apprentissage proposée dans une classe bilingue , permet une assimilation ludique et plus naturelle de la langue.

- Quelle est la différence avec un cours de langue classique et ceux dispensés dans une classe bilingue ?

Avec cette méthode d’immersion, l’élève d’une classe bilingue débloque ses mécanismes d’apprentissage. Les établissements proposent environ 3-4 heures de cours de langues par semaine, avec les résultats que tout le monde connaît. Les classes bilingues , elles, proposent près de 10 heures par semaine. A ces 10 heures s’ajoutent des ateliers et des activités extra-scolaires en anglais.

- Un enfant ayant suivi toute sa scolarité dans une classe bilingue peut-il oublier la langue apprise ?

La pratique ainsi que la méthode d’immersion proposée par les classes bilingues permettent de maintenir le niveau des élèves. Un jeune qui ne pratique plus du tout sa seconde langue peut complément l’oublier. Rien n’est acquis, pas même une langue maternelle. Celle-ci peut effectivement être oubliée et remplacée après une absence totale de pratique (orale et écrite) de plusieurs années.

C’est pourquoi, au-delà des classes bilingues , les parents doivent encourager leurs enfants à solliciter quotidiennement leurs connaissances linguistiques, afin de favoriser le développement et un maintien de cette aptitude.

Quand initier son enfant aux langues étrangères ? Avec une société en pleine mutation, les échanges linguistiques sont quasi-inévitables. L’apprentissage des langues étrangères est donc devenu un véritable enjeu. Directement concernées par la popularité du bilinguisme, les nouvelles générations sensibilisées de plus en plus tôt. Quel est le moment idéal pour faciliter un tel apprentissage ? Vivolta répond aux questions pratiques des parents.

Parce qu’aujourd’hui, les frontières s’ouvrent au commerce, à l’emploi et aux échanges, les générations futurs seront des citoyens du monde. C’est pourquoi, la maîtrise d’autres langues est considérée comme une véritable richesse.

L'apprentissage des langues chez les bébés…

Héritage culturel ou course à la réussite de leurs progénitures, de plus en plus de parents veulent initier leurs jeunes enfants aux langues étrangères. Désormais, les nourrissons prennent le biberon en anglais avec papa avant d’être baigné en français par maman…et lorsqu’ intervient en plus une jeune fille au pair (allemande, espagnole, chinoise, italienne, russe…), les choses se compliquent. Quand est-il possible et utile d’initier son enfant aux langues étrangères ? Cela peut-il perturber son développement s’il n’a pas encore acquit la parole ? Ces questions récurrentes chez les parents ne connaissent que des réponses approximatives, car le processus d’acquisition de la parole reste difficile à décrypter. Le cerveau des tous petits a des capacités d'apprentissage infinies. Cependant nul besoin de les assommer de tirades multilinguistiques dès la sortie de la maternité. Pendant les premiers mois, la communication repose davantage sur l’émotion, l’expression du visage, l’intonation que sur une réelle compréhension. Habituez-le progressivement sans stresser, ni trop en faire… Dès sa première année, vous pourrez faire les choses plus sérieusement.

Bilingue avant 10 ans, un jeu d’enfant…

L’âge joue bien souvent un rôle fondamental dans le bilinguisme. Les facultés propres à l’enfant, lui permettent d’appréhender et d’intégrer naturellement les apprentissages. Avant 10 ans, il manifeste de nombreuses qualités parmi lesquelles la curiosité, la spontanéité, et la flexibilité… Ces dispositions particulières, le rendent plus adaptable et donc plus disposer à assimiler aisément les connaissances. Pendant ces 10 premières années, l’enfant dispose d’une grande agilité cérébrale, cela favorise la restitution des différents accents. Dès l’âge de 7 ans, l’influence de la langue maternelle prend trop d’importance et provoque une détérioration de ses capacités auditives et mimétiques. Celui-ci devient alors moins sensible aux contrastes de prononciation, qui lui facilitaient jusqu’alors l’apprentissage des langues.

Bilingue après 10 ans, les choses se corsent

éêéèè…En ce qui concerne les foyers unilingues, sachez qu’il est impossible de reproduire, à l’école, le développement naturel d’un enfant placé dans un environnement familial ou social bilingue. Mis à part les établissements spécialisés, l’apprentissage des langues débute dans l’enseignement secondaire. Sachant qu’après 10 ans, le jeune n’a plus la faculté d’appréhender naturellement une langue, son niveau n’atteindra jamais celui d’un natif. Pendant la préadolescence, Le processus de conditionnement de l’oreille à la langue maternelle s’achève. Cette évolution, provoque une sorte de "surdité sélective", qui empêche l’enfant de discerner clairement les différences de prononciation inhérentes à chaque langue. Rassurez-vous néanmoins car rien n’est perdu. L’apprentissage risque simplement d’être moins aisé pour le jeune. Le niveau des classes de langues dans certains établissements du secondaire en est d’ailleurs la preuve. Si pour le préadolescent comme pour l’adulte, il est difficile d’effacer son accent d’origine, rien ne l’empêchera de maîtriser tout le vocabulaire d’une nouvelle langue et à force de travail d’en comprendre presque toute les subtilités.

Retenez enfin qu’une langue étrangère est aussi facile à apprendre qu’à oublier. Aussi, un enfant, même bilingue précoce, peut oublier la totalité d’une langue s’il ne la pratique pas régulièrement. Des solutions telles que les échanges linguistiques, des séjours à l’étranger ou encore des cours particuliers lui permettront de solliciter régulièrement les connaissances acquises et donc de ne pas perdre le rythme.

Faustine Aziavi, mis à jour le 8 mars 2010